Qu’est-ce qu’une commission rogatoire ?
La commission rogatoire a une définition qu’il convient de bien appréhender. La commission rogatoire correspond à un acte d’une autorité judiciaire consistant en une délégation de ses pouvoirs à un officier de police judiciaire ou un magistrat.
Une commission rogatoire, par exemple, peut donner lieu à une délégation des pouvoirs du juge d’instruction aux OPJ afin de perquisitionner un domicile.
Le régime de la commission rogatoire, dans le Code de procédure pénale, se trouve aux articles 151 et suivants.
Quelles sont les conditions d’une commission rogatoire ?
Les conditions à respecter afin de pouvoir délivrer une commission rogatoire sont posées à l’article 151 du Code de procédure pénale.
Il est exposé que la commission rogatoire doit indiquer la nature de l’infraction, c’est-à-dire l’objet des poursuites. Cette commission rogatoire doit être datée et signée par le magistrat qui la délivre et doit être revêtu de son sceau.
De plus, elle doit respecter certaines conditions de formes en comportant les mentions suivantes :
- L’identité des personnes mises en examen par le juge d’instruction, celle des parties civiles, ou encore celle des témoins assistés s’il y en a ;
- L‘identité de la personne à qui le juge d’instruction a délégué ses pouvoirs ;
- Le délai dans lequel la commission rogatoire doit être exécutée.
Qui peut prendre une commission rogatoire ?
Les auteurs d’une commission rogatoire sont :
- En principe, le juge d’instruction: dans le cadre de l’information judiciaire, le juge d’instruction peut requérir, par commission rogatoire, aux OPJ de procéder aux actes d’information qu’il estime nécessaires ;
- La Chambre de l’Instruction: si la Chambre de l’Instruction souhaite procéder à des suppléments d’informations, elle est soumise aux mêmes règles que le juge d’instruction et doit déléguer ses pouvoirs à travers une commission rogatoire ;
- Le Président de la Cour d’Assises ou le magistrat délégué: si l’un de ces magistrats souhaitent réaliser des actes d’instruction, il doit obéir aux règles applicables au juge d’instruction en passant par la délivrance d’une commission rogatoire ;
- Toute juridiction de jugement: comme pour la Chambre de l’Instruction, le Tribunal correctionnel peut vouloir procéder à un supplément d’informations. Il devra alors également se soumettre aux règles des articles 151 à 155 du Code de procédure, applicables au juge d’instruction.
De même, si une juridiction pénale souhaite, dans le cadre d’une affaire dont elle est saisie, entendre un condamné mais que ce dernier est incarcéré en dehors du siège de sa juridiction, elle peut déléguer ses pouvoirs, à l’aide d’une commission rogatoire, à un des juges de la juridiction territorialement compétente afin que cette dernière procède à son audition.
A qui s’adresse une commission rogatoire ?
La commission rogatoire peut s’adresser à :
- Un OPJ: en principe, la commission rogatoire s’adresse aux OPJ afin qu’ils procèdent à certains actes à la place du juge d’instruction, durant l’information judiciaire. L’OPJ peut être désigné directement s’il n’est pas dans le ressort du juge d’instruction en charge de l’affaire. L’OPJ, destinataire de cette commission rogatoire, doit alors en informer le Procureur de la République.
- Un magistrat ;
- Un magistrat de la même juridiction : l’article 151 du Code de procédure pénale (CPP) dispose que le juge d’instruction peut déléguer, par commission rogatoire, à tout juge de son tribunal ;
Bon à savoir : l’article renvoyant au terme de « juge » et non de magistrat indique que le Ministère Public n’est pas compris dans les personnes à qui le juge d’instruction peut déléguer ses actes d’instruction.
- un magistrat d’une juridiction distincte : L’article 151 du CPP dispose que le juge d’instruction peut déléguer, par commission rogatoire, à tout juge d’instruction, y compris ceux se trouvant dans une autre juridiction que celle de son ressort.
Bon à savoir : cette commission rogatoire, concernant le juge d’instruction d’un autre tribunal, n’est plus très utilisée de nos jours au sens où le juge d’instruction chargé de l’affaire peut directement déléguer ses pouvoirs aux OPJ, y compris ceux ne dépendants pas de son tribunal.
Quels actes peuvent être pris au titre de cette commission rogatoire ?
Plusieurs actes d’instruction peuvent être pris par des OPJ dans le cadre d’une commission rogatoire :
- La commission rogatoire peut autoriser des constatations ;
- Dans le cadre de la commission rogatoire, des perquisitions et des saisies peuvent être menées ;
- Suite à une commission rogatoire, des écoutes téléphoniques peuvent avoir lieu ;
- Certaines auditions peuvent également être autorisées.
Toutefois, certains actes ne peuvent être délégués qu’à un magistrat :
- Les auditions des parties civiles, sauf si elles demandent expressément à être entendues par un OPJ ;
- Les auditions de témoins assistés, sauf s’ils le demandent expressément ;
- Les perquisitions dans un cabinet d’avocat, d’un médecin, d’un notaire, d’un huissier ou d’un avoué ;
- Les perquisitions dans le siège d’une entreprise de presse.
Quels sont les délais d’une commission rogatoire ?
Le juge d’instruction fixe le délai dans lequel la commission rogatoire doit lui être retournée avec les procès-verbaux (PV) dressés pour son exécution par l’officier de police judiciaire. Cela signifie par exemple qu’il donne aux OPJ un certain délai dans lequel ils doivent réaliser des perquisitions ou saisies et lui transmettre les PV en découlant.
Si le juge n’a pas fixé de délai, la commission rogatoire et les procès-verbaux doivent lui être transmis dans les 8 jours suivants la fin de l’exécution des opérations exécutées.
Qu’est-ce que la commission rogatoire internationale ?
La commission rogatoire internationale fonctionne selon le même modèle qu’une commission rogatoire normale, mais appliquée au niveau international. Il s’agit d’une entraide entre Etats au stade de la recherche d’informations.
Une commission rogatoire à destination de l’étranger
L’article 734 du Code de procédure pénale dispose que le juge peut faire procéder à des mesures d’instruction ainsi qu’à tout autre acte judiciaire qu’il estime nécessaire dans un Etat étranger.
Il peut procéder à de tels actes en donnant commission rogatoire :
- soit à toute autorité judiciaire compétente de cet Etat ;
- soit aux autorités diplomatiques ou consulaires françaises.
Aucune condition de forme n’est expressément exigée. Toutefois, la commission rogatoire devra comporter un certain nombre de mentions telles que l’identité du mandant.
De plus, la commission rogatoire internationale à destination de l’étranger doit être accompagnée d’une traduction de cette décision dans la langue de l’Etat étranger concerné.
Une commission rogatoire en provenance de l’étranger
La France peut également recevoir des commissions rogatoires venant d’un Etat étranger. Cela signifie qu’une juridiction pénale pourra mettre à exécution des actes d’informations demandés par un pays étranger.
S’agissant de telles commissions rogatoires, seul le Tribunal judiciaire est compétent pour en connaître. La compétence territoriale d’une commission rogatoire en provenance de l’étranger revient au Tribunal judiciaire dans le ressort duquel la commission rogatoire doit être exécutée.
Mise en ligne : 2 juin 2021
Rédacteur : Nina LA CASA, Master 1 Droit Pénal et Sciences Criminelles de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Sous la direction de Maître Elias BOURRAN, Avocat au Barreau de Paris et Docteur en Droit.
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