Contribution aux pertes : tout savoir en 5 min

Qu’est ce que l’obligation des associés de contribuer aux pertes ? 

La « perte » désigne une dette de la société qui n’a pas pu être réglée à sa dissolution, et qui devra être supportée par les associés. La notion de perte en droit des sociétés se définit relativement à l’obligation qui pèse sur les associés d’y contribuer. Cette obligation de contribution aux pertes apparaît à l’article 1832 du Code Civil. 

Parmi toutes les obligations qui pèsent sur les associés au moment de fonder la société, la contribution aux pertes est la plus risquée

C’est pourquoi il est important pour tout associé d’entreprise de comprendre ce à quoi elle l’engage exactement. 

Vous souhaitez comprendre les implications de la contribution aux pertes en droit des sociétés ? Cet article est fait pour vous. 

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La contribution aux pertes : définition 

Dès lors qu’ils entendent profiter des bénéfices de la société, les associés s’engagent en contrepartie à en supporter les pertes éventuelles. 

C’est une condition de formation de l’entreprise, qui renvoie à la volonté même de s’associer en effectuant un apport en société

En effet, au moment de fonder une société, les associés espèrent en tirer profit

Ils espèrent non seulement des bénéfices d’activité à chaque exercice social, mais également le partage d’un boni de liquidation

À la liquidation des actifs de la société (revente de son matériel et de ses propriétés, encaissement de ses créances), chacun espère recevoir une part supérieure en valeur à celle qu’il a apportée au capital social au moment de la fondation de la société. 

En revanche, si au moment de la liquidation, le paiement du passif de la société (dettes courantes et de long-terme) devait avoir entamé le capital social, une « perte » serait constatée. 

Bon à savoir : la notion de « perte » en droit ne correspond pas à celle de perte comptable. La perte comptable désigne tout excédent de charges de la société, y compris des « dettes » qui ne sont dues à personne (amortissements, provisions). 

Dans ce contexte, la qualité d’associé oblige chacun d’entre eux à supporter cette perte. 

Qu’il y ait dans le fond consentement des associés ou non, chacun d’entre eux est réputé avoir assumé ce risque par la seule manifestation de sa volonté de s’associer. 

 

Un associé peut-il se soustraire à l’obligation de contribuer aux pertes ? 

Dans ce contexte, il semble impossible à l’associé de se soustraire à l’obligation qui pèse sur lui de contribuer aux pertes de la société. 

D’une part, parce que la société dispose d’une action en justice contre lui pour forcer l’exécution de son obligation de contribution aux pertes. 

Bon à savoir : l’associé réticent pourrait en outre engager sa responsabilité à l’égard des autres associés. 

D’autre part, parce que la contribution aux pertes témoigne de la volonté de s’associer, et qu’un défaut de contribution pourrait entraîner la nullité de la société. 

 

Quelle est la différence entre l’obligation aux dettes et la contribution aux pertes

Il convient toutefois de limiter l’étendue d’une obligation aussi conséquente pour les associés. 

En particulier, il convient de distinguer l’obligation aux dettes sociales et la contribution aux pertes

La contribution aux pertes est l’obligation des associés d’essuyer les pertes de la société une fois qu’elle est dissoute. 

L’obligation aux dettes désigne l’obligation des associés de régler les dettes de la société alors qu’elle existe et fonctionne encore. 

Dans certaines sociétés, les associés peuvent en effet être tenus, avant liquidation, de régler les dettes de la société si celle-ci n’en est plus capable. 

L’obligation aux dettes caractérise ainsi le droit éventuel de poursuite des créanciers de la société en cours d’exercice contre les associés. 

C’est un droit de créance des tiers sur les associés, alors que la contribution aux pertes est un droit de créance de la société sur les associés. 

Toutefois, là où l’obligation de contribuer aux pertes existe dans toute société, l’obligation dettes sociales n’existe que dans les sociétés à responsabilité illimitée

Bon à savoir : en ce sens, l’action par laquelle un tiers demande à un associé de régler les dettes de la société sur le fondement de son obligation de contribuer aux pertes n’est pas recevable

Comment est mise en œuvre la contribution aux pertes des associés

 

Quand est mise en œuvre la contribution aux pertes ? 

À la liquidation 

En principe, la contribution aux pertes est mise en œuvre à la liquidation de la société. 

En effet, une perte ne peut être constatée qu’une fois le passif réglé et l’actif réalisé. 

Dans ce contexte, en principe, aucune action en vue d’obliger les associés à contribuer aux pertes ne peut être exercée avant liquidation. 

Pendant l’exercice 

Par exception, le juge a admis que les associés se livrent à une contribution annuelle aux pertes

Pour ce faire, les associés doivent toutefois en convenir par décision unanime, ou en insérant une disposition expresse dans les statuts de la société. 

Bon à savoir : dans la comptabilité de la société, les sommes versées par les associés pour compenser les pertes de l’année sont conçues comme de nouveaux apports. Si un tel procédé permet de prévenir les pertes à la liquidation, la valeur du boni sera réduite dès lors que l’apport de chaque associé augmente. 

 

Qui met en œuvre la contribution aux pertes ? 

Par principe, c’est le liquidateur qui opère la contribution aux pertes. 

Bon à savoir : un liquidateur est une personne (physique ou morale) chargée des opérations de liquidation. Il peut être désigné à l’amiable, ou par décision de justice dans le cas d’une procédure de liquidation judiciaire

En effet, la contribution aux pertes est une créance de la société sur les associés

C’est donc la société qui la met en œuvre par le biais du liquidateur dont elle se dote. 

De même, seuls la société ou son liquidateur judiciaire peuvent demander l’exécution de la contribution en justice à un associé. 

En revanche, un tiers n’est jamais fondé à mettre en œuvre la contribution aux pertes. 

 

Quelle est la contribution aux pertes de chaque associé ? 

Le principe posé par l’article 1844-1 du Code Civil est que chaque associé contribue aux pertes de la société à proportion de sa participation dans le capital social. 

La philosophie derrière ce principe est que les associés avec le plus de parts dans le capital ont indûment perçu des dividendes alors que la société essuyait en réalité des pertes. 

Bon à savoir : si un associé a fait un apport en industrie, alors il contribue aux pertes à proportion de l’associé qui a le moins participé en numéraire.

Toutefois, les associés peuvent convenir d’une autre clef de répartition des pertes.  

Il est courant qu’ils optent dans les statuts, ou dans des actes postérieurs pour une répartition inégalitaire des pertes entre associés. 

Un associé peut-il être totalement exonéré de contribution aux pertes ? 

Dans ce contexte, il semble tentant pour un actionnaire majoritaire de s’exonérer totalement dans les statuts de la participation aux pertes. 

Toutefois la répartition statutaire des pertes n’est pas entièrement libre, et doit respecter les dispositions et principes du droit des sociétés. 

En particulier, une clause qui exonérerait un associé de la totalité des pertes serait qualifiée de « clause léonine « , au sens où elle lui procurerait un avantage exorbitant et contraire à la solidarité attendue au sein d’une société. 

Dès lors, elle serait réputée non écrite et privée d’effets juridiques. 

Mise en ligne : 23 juin 2021

Rédacteur : Charles DELIE, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Sous la direction de Maître Élias BOURRAN, Avocat au Barreau de Paris et Docteur en Droit.

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