Quels vices peuvent altérer le consentement des associés ?
Les trois vices communs du consentement
En droit français, le consentement d’une partie doit nécessairement être libre et éclairé.
La violence
Dans ce contexte, toute manœuvre qui forcerait l’associé à consentir, par la menace physique ou morale, entacherait du vice de violence son consentement, en le privant de liberté.
Dans les relations d’affaires, “l’abus de dépendance” est une forme de violence économique et commerciale de plus en plus caractérisée. Elle consiste pour son auteur à abuser de la position de dépendance professionnelle de la victime afin de lui imposer les termes d’un contrat.
Le dol
Le consentement de l’associé d’entreprise serait également vicié dans l’hypothèse où, sans violence, un autre associé ou un tiers l’aurait trompé à dessein, par mensonge ou par omission. C’est le deuxième vice du consentement, appelé dol.
Le dol est rarement caractérisé car il implique de prouver chez un associé l’intention de tromper ses coassociés. En outre, dans les relations d’affaires, le fait de vanter et de “survendre” une entreprise est jugé légitime, et est admis dans le cadre de la négociation. C’est le “dolus bonus”.
Attention toutefois : le dolus bonus connaît des limites en matière de négociation. Un associé se rendra coupable de dol au moment de la fondation d’une société s’il garantit à ses coassociés la viabilité économique d’une entreprise qui a peu de chances de succès.
L’erreur
Au-delà du dol, le consentement des associés n’est pas éclairé s’ils sont victimes d’erreur, s’ils se trompent d’eux-mêmes sur l’objet et la teneur de leur consentement. L’erreur est à ce titre le vice du consentement le plus répandu, y compris en droit des sociétés. Toutefois, l’erreur ne prend la qualité du vice qu’à partir du moment où elle est excusable et déterminante.
Bon à savoir : en droit des sociétés, une erreur sera jugée déterminante si elle porte sur une qualité essentielle du contrat de société (sur l’objet social, ou sur la forme de la société par exemple) ou sur l’identité d’un coassocié.
Il existe en revanche toute une diversité d’erreurs indifférentes dans le consentement des associés.En particulier, si un des associés fait une erreur dans la valorisation de la société qu’il rejoint, il est considéré que cette erreur n’a pas vicié son consentement à participer à la société.
La simulation
En droit français, le consentement d’une partie doit également être sincère. Bien entendu, s’il est vicié par la violence, le consentement de l’associé n’est pas sincère. C’est encore le cas s’il est simulé.
La simulation est une hypothèse particulièrement courante en droit des sociétés. Il s’agit pour un des associés de poursuivre derrière son engagement dans une société des objectifs personnels.
C’est généralement le cas lorsque la société cache de manière illicite une opération d’une nature différente (donations familiales, contrat de travail), ou lorsqu’elle est fictive.
Bon à savoir : une autre hypothèse concerne celle du “prête-nom” : une personne simule sa qualité d’associé pour une autre personne dont il est mandataire. Cette simulation n’est pas toujours sanctionnée par les juges.
Dans ces hypothèses, le consentement donné par les associés n’est qu’apparent, puisque l’objet du consentement est simulé.
Quelles sont les conséquences juridiques d’un consentement vicié ?
Considérant que la société est un nœud d’intérêts partagés, le droit exige que le consentement libre, éclairé et sincère de tous les associés soit réuni dans les cas indiqués ci-dessus. Si tel n’est pas le cas, la décision prise par les associés n’est pas valide. L’acte qui la traduit juridiquement est frappé de nullité.
Bon à savoir : la nullité d’un acte juridique se distingue de sa caducité, de sa résiliation ou de sa résolution parce qu’elle est nécessairement rétroactive. Cela signifie en droit des sociétés que toutes les sommes engagées (apports en société, résultats) dans l’entreprise doivent être restituées, afin de remettre les associés dans un état semblable à celui préalable à leur consentement.
Même s’il est minoritaire, un actionnaire peut en principe demander la nullité d’un contrat de société pour lequel son consentement a été vicié. Il peut également demander la nullité de l’acte réunissant le consentement de tous les associés pour une décision s’il considère que le sien a été vicié.
Toutefois, étant donné les enjeux de la vie de la société et les coûts de leur nullité, les juges ont tendance à tempérer ce principe.
D’une part, en matière de simulation, la sanction n’est pas toujours la nullité mais “l’inopposabilité de l’acte apparent”, c’est-à-dire l’impossibilité pour les simulateurs de se prévaloir de l’acte simulé devant les tiers.
D’autre part, le juge a une tendance à sanctionner les vices d’ampleur, et à ménager les vices mineurs.
Dans les SARL et les SA en particulier, il considère que le contrat de société doit être annulé uniquement si le consentement de tous les associés fondateurs a été vicié.