Clause de non concurrence : tout savoir en 5 min

Clause de non concurrence : comment éviter la nullité ?

Afin d’éviter tout risque de concurrence déloyale, l’employeur peut insérer une clause de non-concurrence au sein du contrat de travail de ses salariés. La rédaction d’une telle clause est également envisageable pour régir les rapports entre plusieurs associés créateurs d’une société.

En effet, il est possible d’introduire dans les statuts de la société ou dans un pacte d’associé une clause selon laquelle en cas de départ de l’un des associés, se dernier devra respecter certaines obligations professionnelles.

Cette clause aura pour effet de protéger l’entreprise ainsi que son savoir-faire, et limitera la liberté professionnelle de celui à l’encontre duquel elle s’applique.

C’est parce qu’elle a pour effet de limiter la liberté d’une personne que la clause de non-concurrence est soumise à un certain nombre de critères qui, s’ils ne sont pas respectés, peuvent entrainer sa nullité.

Avocats en droit des affaires, nous pouvons vous accompagner en matière de clause de non concurrence ainsi que de vous conseiller dans le cadre d’un éventuel contentieux.

Qu’est-ce qu’une clause de non concurrence ?

La clause de non-concurrence est une clause insérée dans un contrat de travail, dans un pacte d’associés ou dans les statuts d’une société, visant à limiter la liberté d’un salarié ou d’un associé d’exercer des fonctions similaires dans une entreprise concurrente ou à son propre compte à la suite de la rupture de la relation professionnelle.

En pratique, une telle clause peut interdire au salarié ou à l’associé d’exercer telles fonctions dans un périmètre territorial bien défini et pendant une période de temps donnée.

En contrepartie de cette limitation de liberté, il est impératif de prévoir une rétribution financière au bénéfice du salarié ou de l’associé contre lequel la clause est applicable.

Il est intéressant de souligner que cette clause n’est pas encadrée par la loi, mais a uniquement été définie par les juges dans les décisions de justice. Elle est donc de nature jurisprudentielle.

La clause de non concurrence dans les rapports entre un employeur et un salarié

L’insertion d’une telle clause dans le contrat de travail d’un salarié apparait comme un moyen pour l’employeur de se protéger de l’éventuelle concurrence que pourrait lui faire un ancien salarié en exerçant des fonctions similaires à proximité de son ancien lieu de travail.

Néanmoins, cette clause est une réelle entrave à la liberté d’exercice professionnelle du salarié. À ce titre, elle est très strictement réglementée et doit satisfaire plusieurs conditions.

En effet, parce qu’elle est contraignante pour le salarié, il est nécessaire de trouver un équilibre entre l’insertion d’une telle clause qui protège l’employeur et restreint la liberté d’exercer une activité professionnelle pour le salarié.

La clause de non concurrence dans les rapports entre associés

Les clauses de non-concurrence peuvent également être utiles dans les rapports entre associés. Tout comme un employeur, les associés d’une société peuvent choisir de protéger la valeur de l’investissement fait dans la société.

Cette clause apparaît ici comme un subtil mélange entre la préservation de la liberté d’entreprendre et l’obligation de ne pas avoir des pratiques concurrentielles déloyales.

On peut trouver ces clauses dans les statuts de SAS, SARL ou même de SA. Aussi, les associés peuvent prendre le soin de rédiger un pacte d’associés dans lequel figurera les conditions auxquelles s’exposent un salarié qui souhaite quitter la société.

Tout comme une clause qui serait insérée dans un contrat de travail, la clause de non concurrence inscrite dans un pacte d’associés doit répondre à certaines conditions particulières.

Quels sont les critères de validité de la clause de non concurrence ?

La validité de la clause de non-concurrence repose sur le fait de satisfaire un certain nombre de critères cumulatifs.

Quelque soit son support (contrat de travail, pacte d’associés, statuts) la clause doit impérativement protéger à la fois les intérêts légitimes de l’entreprise et les intérêts de la personne contre laquelle elle à vocation à s’appliquer.

Elle ne doit en effet pas le priver de travailler à nouveau. La clause de non-concurrence peut faire l’objet de plusieurs limitations.

 

Limitation de la clause dans le temps

La limitation de la clause dans le temps signifie que la clause doit être précise sur la durée de l’interdiction d’entrer en concurrence.

Cette durée ne doit pas être excessive. Le caractère excessif est apprécié par rapport aux spécificités de l’emploi du salarié.

La jurisprudence considère ainsi qu’une clause qui s’appliquerait au-delà de 5 ans est illicite. A l’inverse, une clause qui applicable 18 mois est valable.

 

Limitation de la clause dans l’espace

La zone géographique dans laquelle le salarié ne peut pas exercer doit être déterminée par la clause et s’appliquer à un espace raisonnable et précis.

La clause ne peut pas viser une zone géographique trop vaste. Elle vise le plus souvent la zone où le salarié a travaillé pour son employeur ou les départements limitrophes.

Le juge devra analyser au cas par cas si la délimitation de la clause dans l’espace est justifiée.

A ce titre, la jurisprudence a pu décider qu’une clause de non-concurrence s’appliquant à l’ensemble du territoire français est valable pourvu que l’ancien salarié puisse continuer à exercer une activité professionnelle.

 

Limitation de la clause à une activité spécifiquement visée

La clause de non-concurrence doit spécifier l’activité visée ou la fonction à laquelle elle s’applique.

Par exemple, la clause de non-concurrence peut viser l’activité de fleuriste ou de coiffeur.

 

Limitation de la clause en échange d’une indemnité compensatrice

La clause de non-concurrence ne sera pas valable si elle ne fait pas l’objet d’une contrepartie financière.

La contrepartie financière est due dès lors que la clause est applicable, et ce quel que soit le mode de rupture du contrat. Ainsi, il obtiendra l’indemnité compensatrice même s’il démissionne ou s’il est licencié pour faute grave.

Cette contrepartie peut prendre la forme d’un capital ou d’une rente et doit être versée après la rupture du contrat de travail, et non pendant son exécution. L’employeur devra veiller à verser une indemnité raisonnable qui sera fixée avec le salarié. Si celle-ci est dérisoire, les magistrats estimeront qu’il n’y a pas de réelle contrepartie financière et invalideront la clause.

A ce titre, la Cour de cassation a décidé que la contrepartie financière prévue au contrat qui ne s’élevait qu’à l’équivalent de 2,4 mois de salaire pour une durée d’exécution de la clause de non-concurrence de 24 mois était dérisoire, eu égard aux importantes restrictions auxquelles était soumis le salarié, disproportionnées par rapport à l’indemnité mensuelle qui devait en être la contrepartie.

 

Limitation de la clause pour assurer la protection des intérêts légitimes de la société

La clause de non-concurrence doit se montrer indispensable pour assurer la protection des intérêts de l’entreprise.

Elle doit donc être justifiée par un risque de dommage réel tels que par exemple :

  • L’utilisation d’un savoir-faire qui lui est propre ;
  • L’accès à des informations sensibles ;
  • Le contact avec la clientèle ;
  • La transmission d’un secret de fabrication.

Cette condition est sans doute la plus difficile à appréhender dans la mesure où il faut apprécier la nécessité de la clause au regard de l’entreprise d’abord, puis du poste concerné ensuite.

En pratique, il ne sera pas possible de prévoir une clause de non concurrence dans un contrat de travail afférent à un poste de caissier en grande surface par exemple. Il sera difficile de démontrer en quoi une telle fonction exercée dans une entreprise concurrente risquerait de nuire aux intérêts de l’entreprise.

Le respect de ces critères étant nécessaire pour assurer la validité de la clause de non-concurrence, il peut être judicieux de se rapprocher d’un avocat pour en vérifier la validité. En effet, même de bonne foi, une formulation trop vague, un oubli ou une inexactitude pourront entraîner sa nullité. Une clause de non concurrence abusive pourrait même être caractérisée.

Sachez qu’il est également possible de contourner les effets d’une clause de non concurrence.

Comment contourner une clause de non concurrence ?

Si la validité de la clause de non-concurrence ne fait pas débat, il est toujours possible d’y renoncer. En effet, l’employeur a la possibilité de renoncer unilatéralement à la clause dès lors que cette faculté est prévue par le contrat de travail.

Lorsque la faculté de renonciation à la clause de non-concurrence n’est pas prévue dans le contrat de travail, l’employeur devra recueillir l’accord du salarié afin de lever la clause de non-concurrence.

En cas de refus du salarié, il devra payer ce qui était convenu entre les parties dans le contrat. De même, cette renonciation ne peut résulter de mentions générales ou de la mention « libre de tout engagement » présente dans de nombreux contrats de travail.La renonciation doit être expresse, non équivoque et notifiée individuellement au salarié.

Si la clause de non-concurrence ne respecte pas l’un des critères cumulatifs évoqués, cette dernière ne sera pas reconnue comme valable et ouvre droit au paiement de dommages et intérêts au bénéfice du salarié.

Le salarié qui estime que la clause de non-concurrence n’est pas valable peut se faire accompagner par son avocat et en demander l’annulation en saisissant le Conseil de prud’hommes.

Les conseillers prud’homaux (et, le cas échéant, les magistrats de la Cour d’appel) vont contrôler la proportionnalité de la clause et analyser si chaque critère est raisonnable afin de déterminer sa validité ou si c’est une clause de non concurrence abusive.

Si les conseillers prud’homaux ou les juges considèrent que la clause de non-concurrence est nulle, le salarié sera libéré de son obligation de non-concurrence.

Il ne pourra plus prétendre au versement d’une contrepartie financière, mais pourra garder les sommes qui lui ont été versées s’il a respecté ladite clause.

Le salarié peut alors introduire une action en dommages et intérêts contre son ancien employeur et devra prouver l’existence d’un préjudice pour obtenir une indemnisation.

Mise en ligne : 8 décembre 2020

Rédacteur : Julie Dinarque, Master 2 en Droit Anglais et Nord-Américain des Affaires de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne et Margaux DUTERNE, Master 2 en Droit européen et international des affaires à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Sous la direction de Maître Elias BOURRAN, Avocat au Barreau de Paris et Docteur en Droit.

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