Déclaration des patients atteints du Covid-19 : que faut-il savoir ?

L’obligation pour les professionnels de santé de déclarer leurs patients atteints du Covid-19

Obligation de déclaration des patients atteints du Covid-19 : une violation du secret médical ?

En France, certaines professions sont soumises au respect du secret professionnel (article 226-13 du Code pénal).

Le secret professionnel exige la confidentialité des informations détenues par le professionnel. Il se justifie par le droit au respect de la vie privée de la personne concernée.

Le secret médical est l’obligation faite au médecin de ne pas divulguer les informations relatives à son patient.

Le secret médical constitue également un droit de ne pas voir ses données être divulguées, dont la personne malade peut se prévaloir (depuis la loi Kouchner du 4 mars 2002).

En tant que médecins en France, vous êtes soumis au respect du secret médical. Les risques liés à la violation de secret médical sont nombreux:

  • Sanctions disciplinaires prononcées par le Conseil national de l’ordre des médecins (ou par les ordres des autres professions de santé ;
  • Sanctions civiles : déclaration de responsabilité civile impliquant le paiement de dommages et intérêts à la victime ;
  • Sanctions pénales : une peine maximale d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende est prévue par le Code pénal pour toute divulgation d’une information à caractère secret par la personne qui est en dépositaire.

Avocats en droit de la santé, nous pouvons vous accompagner dans l’exercice des professions médicales et pharmaceutiques et, plus spécifiquement, de vous conseiller dans votre exercice professionnel pour respecter au mieux les droits de vos patients.

Qu’est-ce que l’obligation de déclaration incombant au médecin?

Pourquoi existe-t-il une obligation de déclaration des patients atteints du Covid-19 ? En principe en France, le secret médical est une obligation professionnelle imposée par le Code de la santé publique (article L 1110-4 du Code de la santé publique).

C’est aussi une obligation d’ordre déontologique pour le médecin (article R 4127-4 du Code de la santé publique).

Par exception, la loi prévoit certaines situations où la divulgation de données concernant le patient est imposée au médecin. C’est le cas par exemple, pour l’obligation de déclaration des sévices et mauvais traitements qui est dictée au médecin par le Code pénal (article 226-14).

Dans le même sens, le Code de la santé publique exige du médecin qu’il dévoile aux autorités sanitaires certaines informations sur l’état de santé de son patient, lorsqu’il s’agit de certaines maladies infectieuses.

Cette obligation de déclaration des maladies concerne:

  • Les maladies qui nécessitent une intervention locale, nationale ou internationale ;
  • Les maladies dont la surveillance est nécessaire à la conduite et à l’évaluation de la politique de santé publique.

Cette déclaration doit être faite :

  • Par les médecins, responsables des services et laboratoires de biologie médicale publics et privés ;
  • A l’autorité sanitaire, c’est à dire au médecin de l’Agence régionale de santé désigné par le Directeur Général de l’Agence.

Il existe une liste exhaustive des maladies qui font l’objet d’une déclaration obligatoire aux autorités sanitaires (article D 3113-6 du Code de la santé publique).

Les médecins doivent respecter certaines formalités pour effectuer cette déclaration de données prescrite par la loi.

La déclaration des maladies énoncées par le Code de la santé publique prend la forme d’une notification de données individuelles.

La notification consiste à remplir un formulaire comportant des informations relatives à l’état de santé de la personne malade.

Le formulaire doit être ensuite être transmis aux autorités sanitaires par voie postale (avec la mention « secret médical » sur le pli) ou par télétransmission (avec chiffrement des données pour conserver la confidentialité).

Par exception, la déclaration de certaines maladies doit être faite par signalement.

Le signalement implique la possibilité directe, pour le destinataire de ces informations, de prendre certaines mesures de prévention individuelles ou collectives contre la maladie (article R 3113-4 du Code de la santé publique).

La loi précise que les informations divulguées lors d’une déclaration de maladie, sont « nécessaires à la surveillance épidémiologique » (article R 3113-2 du Code de la santé publique).

En outre, toutes les personnes qui sont appelées à être confrontées aux données concernant l’état de santé de la personne malade, sont soumises au secret médical.

Quel est l’impact de l’épidémie de Covid-19 sur l’obligation de déclaration du médecin?

Depuis la loi du 12 mai 2020 prorogeant l’Etat d’urgence sanitaire en France, le Covid-19 fait partie des maladies qui font l’objet d’une transmission obligatoire à l’autorité sanitaire. Ainsi, repose sur les professionnels de santé une obligation importante de déclaration des patients atteints du Covid-19.

Les médecins et responsables des services et laboratoires de biologie médicale doivent utiliser un système d’information qui est destiné à l’identification des personnes atteintes par le coronavirus, et de celles présentant un risque d’infection.

C’est dans le cadre d’enquêtes sanitaires réalisées sur les personnes affectées que sont collectées et partagées les informations personnelles sur l’état de santé de la personne malade.

Ces enquêtes sanitaires reposent sur un système de coopération à trois niveaux :

  • Les médecins de ville assurent la prise en charge des patients et procèdent au recensement des « cas contacts », en recueillant des données sur l’entourage du patient atteint de la maladie du Covid-19.

Attention : Le recensement des personnes de contact se fonde sur le consentement du patient : le patient peut ou non accepter de dévoiler l’identité des personnes avec lesquelles elle a été en contact.

  • Une plateforme territoriale de l’Assurance Maladie est chargée de finaliser le recensement et de prendre contact avec les personnes « à risque » ;
  • Enfin, l’Agence Régionale de Santé et Santé Publique France sont chargés, d’identifier les chaînes de transmission à partir des informations fournies.

Attention : Cette obligation se limite au patient testé positif au Covid-19. Au-delà, il n’y a pas d’obligation juridique ou réglementaire de déclarer les cas proches.

Quel est l’impact de l’épidémie de Covid-19 sur le respect du secret médical ?

L’arrivée de l’épidémie liée coronavirus en France a poussé le gouvernement à étendre le champ de l’obligation de déclaration de certaines maladies, incombant au médecin : les professionnels ont désormais l’obligation de déclaration des patients atteints du Covid-19.

La loi du 12 mai 2020 est claire : l’obligation de transmission de données personnelles portant sur les patients atteints du Covid-19, est une dérogation au respect du secret médical.

La loi autorise le traitement et le partage de données à caractère personnel concernant : d’une part les personnes atteintes par le virus, et d’autre part celles concernant les personnes avec qui elle a été en contact. Ce traitement est possible même sans le consentement des personnes intéressées.

La finalité affichée de cette dérogation est la surveillance épidémiologique du coronavirus.

C’est la crise sanitaire et la protection de la santé publique et individuelle qui justifient cette violation du secret médical et celle du droit à la protection de la vie privée du patient.

Cet impératif de protection de la santé publique est un « objectif à valeur constitutionnel » en France, depuis une décision du Conseil constitutionnel de 1991.

L’impératif de protection de la santé publique prévaut dans ce cas sur le secret médical et la protection de la vie privée du patient.

Il a donc fallu trouver certaines garanties pour tenter d’atténuer les atteintes au secret médical et au respect de la vie privée :

  • La dérogation légale au secret médical est limitée dans le temps à une durée maximale de six mois, à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire;
  • L’accès aux informations par les médecins est limité à ce qui est strictement nécessaire à leur intervention dans la prise en charge de la maladie liée au coronavirus;
  • La communication des informations sur les personnes à risques est soumise au consentement du patient atteint;
  • Un Comité de contrôle est chargé de vérifier le respect des garanties entourant le secret médical et la protection des données personnelles.

La loi incite-t-elle financièrement le médecin à déclarer les cas de Covid-19?

La loi prévoit que le médecin peut percevoir une majoration du tarif de leur consultation de 30 € s’il participe au système d’information et d’identification des personnes atteintes de la maladie du Covid-19 et des « cas contacts ».

Cette « majoration pour consultation initiale d’information du patient et de mise en place d’une stratégie thérapeutique » ou « MIS », est perçue lors de la seconde consultation du patient ayant été positif au test de dépistage du Covid-19.

Pour information, la majoration n’est pas à la charge du patient mais entièrement prise en charge par l’Assurance Maladie. Le patient avancera les frais engendrés par la majoration puis se verra remboursé par l’Assurance Maladie.

Cette majoration est destinée à reconnaître l’engagement des médecins dans ce dispositif et à les encourager à poursuivre leur investissement dans la lutte contre le Covid-19 en France.

Pour autant, la loi précise que la collecte de ces données ne peut pas faire l’objet d’une rémunération liée au nombre et à la complétude des données recensées pour chaque personne enregistrée.

Les médecins sont débiteurs d’une obligation de déclaration de certaines maladies aux autorités sanitaires, dont le Covid-19 fait partie.

Mais que risquent-ils s’ils refusent, ou ne se soumettent pas à cette obligation légale ?

Pour les médecins, il n’existe pas de sanction expressément prévue par les textes en cas de non-respect de l’obligation de déclaration des maladies, prévues par la loi.

Néanmoins, ils peuvent voir leur responsabilité pénale engagée, pour non-respect des règles prescrites par la loi.

Sur le plan déontologique, la responsabilité disciplinaire des médecins peut être mise en cause par le Conseil national de l’ordre des médecins, à défaut de respect des obligations déontologiques.

Par conséquent, si vous êtes médecin, il est indispensable de connaître la réglementation en vigueur pour garantir un exercice sécurisé de la profession.

D’autant plus qu’elle est en constante modification actuellement, la législation peut constituer un réel appui dans la vie quotidienne des médecins.

Dans ce contexte, nous proposons aux professionnels de santé de les accompagner dans l’entreprise de leur activité professionnelle, et de les conseiller sur leurs interrogations quant aux aspects juridiques de celle-ci.

Mise en ligne : 19 juin 2020

Rédacteur : Gabrielle CANCALON, Juriste. Sous la direction de Maître Amélie ROBINE, Avocat au Barreau de Paris et Docteur en Droit.

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