Prise illégale d'intérêts : tout savoir

La prise illégale d’intérêts : comment ça marche ?

La prise illégale d’intérêts est une des nombreuses infractions du droit pénal des affaires, telles que la corruption, le favoritisme, le blanchiment ou encore le trafic d’influence.

La prise illégale d’intérêts est le fait, pour un agent public de prendre, recevoir ou conserver un intérêt dans une entreprise privée, alors qu’elle a un rôle de surveillance ou de contrôle de celle-ci.

Avocats pénalistes à Paris, nous pouvons vous accompagner si vous êtes poursuivi pour une infraction de prise illégale d’intérêts.

Qu’est-ce que la prise illégale d’intérêts ? 

La prise illégale d’intérêts de l’agent en fonction

Le Code pénal apporte, à l’article 432-12, une définition de la prise illégale d’intérêts.

Il indique qu’il est, pour certaines catégories de personne, le fait de :

  • « prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise, ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement ». 

Les personnes pouvant être auteurs sont : 

  • les personnes dépositaires de l’autorité public ;
  • les personnes chargées d’une mission de service public ;
  • les personnes investies d’un mandat électif public. 

Parmi ces catégories, la jurisprudence englobe de nombreuses fonctions, telles que l’inspecteur des impôts, le président d’université, le directeur de service technique d’une commune, etc.

 

La prise illégale d’intérêts de l’ancien agent public 

L’article 432-13 du Code pénal prévoit envisage la prise illégale d’intérêts de l’ancien agent public. Cette infraction est communément nommée « le pantouflage ».

Il s’agit, pour un ancien agent public, de travailler dans une entreprise qu’il a dû contrôler ou surveiller lorsqu’il était agent public, et ce dans les 3 ans qui suivent la fin de ses fonctions.  

Par ailleurs, il est également puni toute participation, par travail, conseil ou capitaux, dans une de ses entreprises, qui possède 30% de capital commun, ou qui a conclu un contrat avec une exclusivité de droit, ou de fait, avec une des entreprises citées précédemment. 

Les personnes pouvant être auteur de cette infraction sont : 

  • la personne membre du Gouvernement, d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante ;
  • la personne titulaire d’une fonction exécutive locale, fonctionnaire, militaire, agent d’une administration publique. 

Ces personnes doivent avoir été chargées de proposer des décisions relatives à des opérations d’une entreprise privée, d’assurer la surveillance ou le contrôle d’une entreprise privée, ou de conclure des contrats ou de donner son avis sur ce sujet. 

Le pantouflage est sanctionné et ces actions le sont également afin de protéger la transparence et éviter la corruption des agents.

Exemple : un inspecteur des impôts qui exerce pour une des entreprises qu’il a contrôlées.

Quels sont les éléments constitutifs de la prise illégale d’intérêts ?

Les éléments constitutifs 

L’élément matériel de l’infraction de prise illégale d’intérêts est le fait, pour un agent public, de prendre, recevoir ou de conserver un intérêt dans une entreprise dont elle n’aurait pas dû bénéficier, car il a commis une ingérence qui a conduit à un conflit d’intérêts

La notion d’intérêt dans la prise illégale d’intérêts est appréciée de manière large par les magistrats. En outre, la notion d’intérêt n’impose pas un avantage matériel, car un avantage moral peut suffire. En ce sens, la chambre criminelle de la Cour de cassation a admis que le simple lien d’amitié étroit entre un maire et un gérant de société peut constituer un intérêt quelconque (Crim. 5 avril 2018).

L’infraction peut également être constituée avec un intermédiaire. Par exemple, est auteur de l’infraction de prise illégale d’intérêts le maire qui conclut des contrats avec une société dont l’un des associés est son fils. (Crim. 20 février 1995). 

S’agissant l’élément moral, c’est une infraction intentionnelle, mais cette intention est déduite du seul fait que l’auteur ait accompli sciemment l’acte de l’élément matériel. 

 

Bon à savoir : l’exception des petites communes 

L’article 432-12 du Code pénal prévoit une exception autorisant ce conflit d’intérêts.

En effet, pour les communes de moins de 3.500 habitants, (des petites communes donc), il est possible pour les maires, les conseillers et adjoints municipaux de traiter avec cette même commune pour le transfert de biens immobiliers ou mobilier, ainsi que pour la fourniture de service sous un certain seuil (16.000€).

Cette exception s’explique par des raisons pratiques, et notamment pour épargner ces petites communes des dépenses inutiles. 

Toutefois, il existe tout de même un cadre légal : ces actes ne doivent être autorisés qu’après une estimation des biens concernés, et après une délibération motivée par le conseil municipal, qui ne peut délibérer à huis clos et la personne concernée ne doit pas participer à la délibération du conseil municipal.

Qu’est-ce que le recel de prise illégale d’intérêts ?

Le recel est le fait de détenir, dissimuler ou transmettre le produit tiré d’une infraction, ou d’en bénéficier en connaissance de cause.

Il est possible de tirer profit d’une prise illégale d’intérêts, par un avantage, une somme d’argent, etc. Celui qui en est bénéficiaire peut être poursuivi pour recel de prise illégale d’intérêts

Quelle peine pour une prise illégale d’intérêts ? 

L’agent en fonction qui commet une prise illégale d’intérêts encourt une peine de 5 ans d’emprisonnement et de 500.000€ d’amende, cette amende peut être portée au double du profit tiré de l’infraction. 

L’ancien agent qui commet un pantouflage encourt une peine de 3 ans d’emprisonnement et de 200.000€ d’amende, dont le montant peut également être porté au double du profit tiré de l’infraction.

De plus, l’auteur peut être condamné à des peines complémentaires, telles que : 

  • L’interdictions de droit civil, familiale, ou civique ;
  • L’interdiction d’exercer certaines fonctions, notamment publique ;
  • La confiscation des objets ou des sommes reçues par l’auteur de l’infraction ;
  • La décision prononcée peut être affichée ou diffusée. 

Bon à savoir : la complicité de la prise illégale d’intérêts est punissable et s’applique à la personne qui facilite par un acte matériel l’infraction, ou qui par un don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir, aura provoqué l’infraction. 

Quelle est la prescription en matière de prise illégale d’intérêts ?

La prescription arrive à son terme au bout de 6 ans, car la prise illégale d’intérêts est un délit.

Cependant, s’il y a eu plusieurs paiements, le point de départ du délai de prescription sera repoussé à la dernière échéance.

Bon à savoir : si l’infraction est dissimulée pour empêcher la découverte des faits, le délai de prescription ne commence à courir qu’au moment où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l’exercice des poursuites.

Mise en ligne : 24 mars 2021

Rédacteur : Nastasia DELLES, diplômée du Master 2 Prévention du risque pénal économique et financier de l’Université de Lorraine. Sous la direction de Maître Elias BOURRAN, Avocat au Barreau de Paris et Docteur en Droit.

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