Procédure de redressement judiciaire : tout savoir

Redressement judiciaire: définition, conditions et procédure

En France, une entreprise en redressement judiciaire est une entreprise se retrouve dans l’impossibilité de rembourser ses créanciers avec la trésorerie dont elle dispose, on dit qu’elle est en « état de cessation des paiements ».

Si la situation est irrémédiablement compromise, et qu’aucune perspective de redressement n’est envisageable, la liquidation de la société est inévitable. La liquidation judiciaire va organiser la vente de tout ou partie des biens de l’entreprise, en vue de rembourser un maximum de créanciers.

Si un redressement est envisageable, l’entreprise pourra faire l’objet d’un redressement judiciaire, permettant d’organiser le remboursement des créanciers et les modalités de poursuite de son activité.

L’objectif du redressement judiciaire est donc de trouver une solution afin que l’entreprise puisse continuer à exercer son activité et éviter ainsi de tomber en faillite.

Avocats en droit des affaires, nous proposons de vous accompagner tout au long de la procédure de redressement judiciaire en matière d’entreprises en difficultés.

Quelles sont les conditions d’ouverture d’un redressement judiciaire ?

Le débiteur doit être soit :

  • Une personne physique exerçant une activité commerciale ou artisanale, une activité agricole ou une activité professionnelle indépendante, y compris libérale ;
  • Une personne morale de droit privé (donc pas une personne publique).

Il doit être en état de cessation des paiements, c’est-à-dire dans l’impossibilité de faire face à ses dettes avec son actif disponible (sa trésorerie).

Enfin, sa situation ne doit pas être définitivement compromise, il doit y avoir une possibilité de redressement.

Comment s’ouvre une procédure de redressement judiciaire ?

Le Code de commerce prévoit 4 cas d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire :

  • À la demande du débiteur dans les 45 jours suivant la date de cessation des paiements, sauf si une procédure de conciliation a été demandée dans ce délai ;
  • À la demande d’un créancier, sauf si une procédure de conciliation est en cours ;
  • À la demande du Ministère Public, sauf si une procédure de conciliation est en cours ;
  • D’office par le Tribunal, si une procédure de conciliation a échoué et que le conciliateur constate la cessation des paiements.

La demande peut donc être déposée par le chef d’entreprise lui-même, qui doit déposer un dossier auprès du Tribunal compétent :

  • Le tribunal de commerce s’il est commerçant ou artisan ;
  • Le tribunal judiciaire dans tous les autres cas.

La demande d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire doit notamment contenir : un extrait K-Bis, un état du passif exigible et de l’actif disponible, la déclaration de cessation des paiements, le nombre de salariés employés à la date de la demande le cas échéant, la situation de trésorerie, etc.

Comment se déroule un redressement judiciaire ?

Dans un premier temps, le juge fixe la date de cessation des paiements dans son jugement d’ouverture.

La période entre la date de cessation des paiements et celle du jugement d’ouverture correspond à la période dite « suspecte » , permettant d’annuler certains actes passés au détriment de l’entreprise (actes gratuits, paiements anormaux, etc).

S’ouvre ensuite une période d’observation, qui débouchera sur un plan de redressement.

 

Redressement judiciaire et période d’observation

Le jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire fait partir une période d’observation.

Durée de la période d’observation

Cette période, d’une durée maximale de 18 mois, a pour objectif d’établir un diagnostic de la situation patrimoniale et financière du débiteur, ainsi qu’un projet de plan de redressement judiciaire.

Le jugement fixe une première durée qui ne peut excéder 6 mois. Cette durée peut être renouvelée une première fois à la demande du débiteur, de l’administrateur judiciaire ou du Ministère Public. Le tribunal décide du renouvellement de cette période après avoir entendu leurs observations. Elle peut être renouvelée une seconde fois uniquement à la demande du Ministère Public s’il justifie qu’une prolongation est nécessaire.

Gestion de l’entreprise pendant la période d’observation

Durant la période d’observation, les dirigeants restent à la tête de l’entreprise et conservent leurs pouvoirs. Cependant, trois éléments peuvent être modifiés :

  • La rémunération du gérant reste en principe inchangée. Elle peut cependant être diminuée à la demande de l’administrateur judiciaire ou du Ministère Public ;
  • Les parts ou actions du dirigeant sont incessibles, il ne peut les vendre pendant toute la durée de la période d’observation ;
  • De manière beaucoup plus rare, et seulement à la demande du Ministère Public, le tribunal peut transférer le droit de vote des dirigeants à un mandataire ad hoc et ordonner la cession de leurs parts ou actions.

Cependant, l’administrateur judiciaire peut s’immiscer dans la gestion de l’entreprise pour les besoins de la procédure.

Inventaire sur la situation du débiteur

Dès l’ouverture de la période d’observation du redressement judiciaire, le mandataire désigné par le juge dresse un inventaire établissant la situation du patrimoine du débiteur et notamment l’estimation des biens de ce dernier.

Cet inventaire est établi de manière contradictoire, le débiteur est donc présent lors de son établissement. S’il fait partie d’une profession réglementée, est également présent le représentant de l’ordre professionnel en question.

Attention : si le débiteur est soumis au secret professionnel, l’inventaire ne doit pas y porter atteinte.

Autres informations sur la situation du débiteur

En parallèle de cet inventaire, le débiteur doit permettre à l’administrateur judiciaire d’établir sa situation patrimoniale et financière.

A ce titre, il lui remet un document indiquant :

  • Ses créanciers ;
  • Le montant de ses dettes ;
  • Ses principaux contrats en cours.

Il les informe également s’il est partie à des instances en cours.

L’administrateur peut demander au débiteur de lui fournir toute autre information lui permettant d’éclairer précisément la situation patrimoniale du débiteur.

Par ailleurs, des licenciements peuvent être envisagés sur autorisation du juge, uniquement s’ils sont urgents, inévitables et indispensables d’après le Code de commerce.

Contrôle de la situation du débiteur après 2 mois

À l’issue d’un délai de 2 mois, un contrôle de la situation du débiteur est effectué. Tous les acteurs de la procédure vont faire le point sur sa situation :

  • S’il le Tribunal constate que le débiteur dispose de capacités de financement suffisantes pour poursuivre la période d’observation, elle se poursuit ;
  • Le cas contraire, la procédure sera convertie en liquidation judiciaire.

 

L’établissement d’un plan de redressement judiciaire

L’arrêté du plan de redressement judiciaire va mettre fin à la période d’observation.

Si à l’issue de cette période le Tribunal considère qu’il existe une réelle possibilité pour le débiteur de se redresser et d’assurer la pérennité de son entreprise, un plan de redressement va être établi.

Élaboration du projet de plan de redressement

L’administrateur judiciaire élabore un projet de plan de redressement judiciaire avec le concours du débiteur. Si aucun administrateur n’est désigné dans le jugement d’ouverture, le débiteur élabore seul ce projet et le soumet au Tribunal.

Le projet de plan doit déterminer les perspectives de redressement de l’entreprise, selon les modes d’exercice de l’activité, les moyens de financement envisageables et l’état du marché. Il contient ainsi des propositions en termes de :

  • Remboursement des créanciers (délais de paiement, remises de dettes, etc) ;
  • Perspectives d’emploi ;
  • Restructuration de l’entreprise.

Consultation des créanciers

Si un Comité de créanciers a été mis en place, visant à les réunir et discuter les propositions de règlement, il va se prononcer sur le projet de plan dans un délai de 20 à 30 jours.

Si aucun Comité n’a été créé, le projet est communiqué aux créanciers qui ont déclaré leur créance. Le mandataire judiciaire peut leur proposer individuellement de répondre, ou les convoquer ensemble et recueillir l’avis écrit de chacun.

Pour les créanciers qui n’ont pas accepté la proposition de plan, le Tribunal peut imposer des délais uniformes de paiement (mais pas des remises de dettes).

Quelles sont les conséquences du redressement judiciaire ?

Après consultation des créanciers, le Tribunal peut :

  • Arrêter le plan et sa durée, qui ne peut être supérieure à 10 ans ;
  • Rejeter le plan : dans ce cas il clôture la procédure. Rien n’interdit au débiteur de proposer un nouveau projet de plan à une audience ultérieure.

Si le plan est arrêté par le Tribunal, le débiteur retrouve l’entière liberté de gérer son entreprise, mais doit exécuter ses engagements contenus dans le plan de redressement judiciaire.

 

Exécution du plan de redressement judiciaire

Lorsque le débiteur a exécuté toutes ses obligations, le Tribunal constate que l’exécution du plan est achevée. Cela correspond à la clôture de la procédure.

S’il prend un acte de disposition contraire à ses obligations, tout intéressé peut en demander l’annulation. En outre, s’il licencie des salariés malgré un engagement contraire dans le plan, il devra verser des dommages-intérêts à ces derniers.

 

Résolution du plan de redressement judiciaire

Le plan de redressement judiciaire peut être résolu pour deux raisons :

  • Inexécution par le débiteur : cela met fin aux opérations en cours et les créanciers recouvrent la totalité de leurs créances. Elle n’entraîne pas l’ouverture d’une nouvelle procédure collective, bien qu’en pratique la perte des avantages accordés par les créanciers mène souvent à la cessation des paiements ;
  • Cessation des paiements : elle entraîne la résolution du plan de plein droit, et ouvre automatiquement une nouvelle procédure de liquidation judiciaire.

Mise en ligne : 31 juillet 2020

Rédacteur : Nathaëlle Gozlan, Elève avocate. Sous la direction de Maître Elias BOURRAN, Avocat au Barreau de Paris et Docteur en Droit.

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